Un agent très secret... mais qui gagne à être connu.
Certaines réunions de talent peuvent attiser la curiosité à la simple mention de leur nom. Mais pour cela, encore faut-il que ces mêmes talents soient déjà reconnus. Si les noms de Éric Close ou Dennis Haysbert ne vous sont guère familiers, leurs visages eux devraient l'être bien plus, en particulier celui de Close. En effet, pour les fidèles de FBI : Portés Disparus il est le Martin Fitzgerald de l'équipe de Jack Malone (sans oublier la série de science-fiction Dark Skies, dans lequel il tenait déjà la vedette), et Haysbert restent pour beaucoup d'autres le Président Palmer de 24 Heures Chrono. Avant de briller chacun de leur côté, ils se sont retrouvés réunis dans une série produite par Glenn Gordon Caron, l'homme derrière Clair de Lune (qui révéla Bruce Willis, avant qu'il ne devienne John McClane) et Remington Steele où on pouvait voir Pierce Brosnan dans sa période pré-James Bond.
Avec de telles références, il est presque évident que Un agent Très Secret (dont le titre original est Now and Again, littéralement « de temps en temps », j'avoue que l'esprit de la traduction m'échappe) a tout pour sortir du lot. Néanmoins, il faut bien avouer que son pitch a de quoi laisser sceptique : alors qu'il s'en allait tranquillement à son travail, Michael Wiseman (John Goodman, oui oui, John Goodman, l'un des potes du Big Lebowski), bon père de famille et bon mari, fait une chute mortelle dans le métro, son corps est récupéré par le gouvernement qui transfert son cerveau dans la tête d'un homme athlétique, ceci pour en faire l'agent secret parfait, qui répondra au nom de Michael Newman (Éric Close). Avec un tel postulat, on peut comprendre que beaucoup se montrent réticents à prendre part à l'aventure.
Ce qui est fort dommage, d'autant plus que la force de la série ne réside pas dans le contexte de série B (voire Z) auquel le pitch renvoie. Au contraire et c'est là que l'on perçoit la patte du producteur, la dynamique de Un agent très secret est plus proche de la comédie romantique. Un choix guère étonnant au regard de la carrière de Caron. Ainsi, au lieu de faire des membres de la famille de Wiseman de simples guest-stars réduites à de furtives apparitions au détour d'une scène (voire être carrément oubliés dès le second épisode), sa veuve et sa fille restent partie intégrante du casting principal... puisque nous voyons leur vie en parallèle aux actions de Newman.
En effet, chaque épisode nous montre d'un côté les missions de Newman dans un style très James Bond et de l'autre, les Wiseman tentant de combler son absence. Un parti-pris risqué, puisque le versant de la chronique familiale aurait pu donner l'impression de freiner l'action. C'est peut-être ce point-là qui peut désarçonner les spectateurs, car, au final, ses deux aspects deviennent homogènes en raison de constante passerelle, permettant de passer à l'un à l'autre : Newman est en permanence préoccupé par sa famille, chaque mission est une occasion pour lui de croiser sa femme, cette dernière a bien du mal à se remettre de la mort de son mari et parle de lui souvent, etc.
Ainsi, la structure du récit de science-fiction et d'espionnage s'avère au final un prétexte pour relancer la dynamique de la comédie romantique. Un constat qui a pu décevoir ceux qui s'attendaient à une série bourrée de testostérone, à une sorte de croisement entre James Bond et X-Files. L'ensemble est plus proche de ce qu'aurait pu être le film True Lies si son réalisateur, James Cameron, avait délaissé les effets pyrotechniques pour peaufiner le versant comique.
Une fois accepté ses caractéristiques, il est difficile de ne pas résister à l'enthousiasme communicatif qui émane de la production. Dans son rôle de super agent secret, Éric Close est tout simplement impeccable, avec un jeu rempli d'auto-dérision et de bonhomie : on rappelle que dans le corps de Newman/Close est censé résider le cerveau de Wiseman/John Goodman. Quant à Dennis Haysbert, qui incarne le scientifique responsable du projet, le Docteur Morris, il est également parfait dans le style très pince sans pince et son duo avec Close fonctionne à merveille. La surprise vient de Margaret Colin dans la peau de Madame Wiseman, elle se révèle attachante alors que pouvait craindre un personnage agaçant. Elle démontre une force de caractère que l'on ne soupçonnait pas derrière un visage très doux.
En somme, ce que l'on retient de la seule cuvée (stoppée après une unique saison) de Un Agent Très Secret ? Une série qui se mettait déjà en danger, enchaînant les situations de plus en plus absurde sans jamais tomber dans le ridicule et dépeignant des personnages plus riches qu'ils en ont l'air malgré l'apparente légèreté de l'ensemble.
Photo Credit : CBS
Commenter cet article