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le cyborgien

Sans snobisme, entre voyage dans le temps et à travers les genres, le Cyborgien tente d'agrandir votre regard.

31 Aug

The Strain : l'invasion a-t-elle commencé ?

Publié par COTE André  - Catégories :  #FX, #fantastique, #Science-Fiction, #The Strain, #Guillermo Del Toro, #vampire, #Chuck Hogan, #Corey Stoll

 

La télévision est un média aux contraintes très différentes du cinéma et beaucoup s'y cassent les dents. Il ne suffit pas d'un visuel fort pour se détacher de la masse. Si une mise en scène particulièrement léchée et une production design très recherchée peuvent faire illusion le temps d'un épisode ou deux, ces deux aspects atteignent bien vite leurs limites au moment d'aborder, ne serait-ce, une saison entière. Une série est un format qui tient avant tout sur la longueur, en cela, elle doit mettre en avant des qualités d'écriture et de caractérisation des personnages. Des aspects qui font encore défaut à The Strain.

 

 

 

L'an dernier, lors de son lancement, tout le monde s'attendait à ce que The Strain soit la réponse de FX à The Walking Dead de AMC. Pensez donc, dans les deux cas, nous avions deux projets parrainés par de grands noms du cinéma fantastique et d'horreur : Frank Darabont, réalisateur de La Ligne Verte et The Myst, d'un côté, et de l'autre, Guillermo Del Toro, qui a à son actif, les deux HellBoy, Blade 2 et Pacific Rim. Malgré son pitch pas très original (encore une invasion de vampires?), The Strain devait marquer le genre et devenir une référence incontournable.

 

Or, au terme d'une première saison poussive, force est de reconnaître que les scénaristes ont encore beaucoup de travail à accomplir pour rendre leur série attractive. Pourtant, la note d'intention des auteurs est tout à fait louable : The Strain raconte bien une invasion de vampires, mais sous un angle lovecraftien, une référence peu commune de nos jours. Effectivement, les plus observateurs auront noté que l'intérêt principal de cette série créée par Del Toro et Chuck Hogan (co-auteur des romans, car oui, la série est une adaptation tout comme The Walking Dead) ne réside pas dans une approche empathique avec les personnages (réduits à des stéréotypes et clichés), mais plutôt à une atmosphère de plus en plus angoissante.

 

 

 

Preuve en est, le rôle des scientifiques, incarnés par Corey Stahl (House of Card, Ant-Man) et Mia Maestra, mis en avant, qui se retrouvent face à une figure mythologique aux origines indéfinies (le mot « vampire » n'est jamais lâché mais leur apparence renvoie aux créatures de Blade 2 et certains traits de leur comportement – l'exposition au Soleil leur est fatal, ils ne sortent que la nuit – ne laisse aucun doute à ce sujet) et dans l'impossibilité de stopper le processus de contamination, puisque le vampirisme est vu comme un virus à éradiquer. Ce schéma rassemble plusieurs thèmes récurrents dans l'œuvre de l'écrivain Howard Phillip Lovecraft : des scientifiques confrontés au surnaturel, qui ne parviennent pas à trouver des termes rationnels pour décrire ce qu'ils ont sous les yeux (d'où la figure de "l'indicible") et se résignent à admettre la nature de ce qui leur est impensable.

 

La première cuvée pouvait se satisfaire de cet état des lieux, en raison de sa nature introductive. Or, la seconde saison se devait de lancer la dynamique de la série une bonne fois pour toutes, en exploitant les amorces d'intrigues esquissées ici et là. Malheureusement, c'est à ce moment que quelques défauts sous-jacents deviennent flagrants : malgré une commande réduite (une dizaine d'épisodes puisque nous sommes sur une chaîne du câble), les auteurs mettent un temps fou pour enclencher ces fameuses amorces ; les personnages ont du mal à sortir du carcan de leurs stéréotypes et, surtout, la forme de la série ne parvient pas à rendre justice à l'invasion qu'elle est censée dépeindre.

 

 

 

Ces à-côtés, on ne peut pas les reprocher ni à Del Toro ni à Hogan, partis sur d'autres projets, mais plutôt à Carlton Cuse qui occupe le poste de showrunner. Ce producteur exécutif, déjà derrière Lost et Bates Motel, semble mal à l'aise à jongler entre l'atmosphère qui se veut envoûtante et l'enchaînement des péripéties à un rythme soutenu. Il faut dire que l'une des tâches de Cuse, en tant que showrunner, est de parvenir à conserver le climat installé par Del Toro lors des premiers épisodes, ce climat devenant instantanément le gimmick de la série, l'élément immédiatement identifiable. Or, le principal souci de Cuse est de ne pas parvenir à manier un cadre qui justifie ce climat au point que l'on frôle souvent le ridicule (l'ambiance amoindrit le rythme et l'efficacité des scènes, les acteurs ont l'air en roue libre, etc) simplement parce que les auteurs se révèlent dépassés par les événements, coincés dans leurs propres parti-pris : alors que l'invasion aurait dû éclater au grand jour (elle est censée se répandre à la vitesse grand V), The Strain conserve son rythme languissant comme si, malgré tout, la contamination parvenait à être maintenue.

 

 

 

Néanmoins, il y a tout de même plusieurs aspects qui vont dans le bon sens. Lors de cette seconde cuvée, nous assistons à une multiplication de sous-intrigues et de personnages secondaires, une tendance qui correspond bien à la logique d'un élargissement du cadre d'une série, au moment d'une saison 2. Parmi les nouvelles têtes, nous retrouvons : une conseillère municipale (incarnée par Samantha Mathis, que les cinéphiles trentenaires reconnaîtrons puisqu'elle a été à l'affiche de Pump of the Volume, Broken Arrow ou encore le Président et Miss Wade), quelques officiers de policier deviennent récurrents, une assistante d'un des grands Maîtres Vampire prend de plus en plus d'importance, etc. Malheureusement, tous ses fils rouges semblent être des handicaps pour les auteurs qui ne parviennent que trop rarement à faire décoller l'ensemble, toutes ses intrigues se mêlant dans un ordre anarchique sans que l'on arrive à percevoir la finalité de tout ça : la romance entre le grand Maître et sa secrétaire est-elle vraiment utile, par exemple, ou n'est-ce qu'une tentative de remplissage ?

 

Ainsi, au terme de quelques épisodes, nous voyons d'autres versants de l'invasion apparaître alors que le premier axe (celui qui suit notre maincast) a bien du mal à avancer. Le plus ennuyeux est même de voir des enjeux annexes prendre de plus en plus le pas sur le fil rouge globale : les rapports entre Goodweather et son fils seraient juste un prétexte pour un simple changement de look ? On veut bien faire confiance aux auteurs et considérer que tout cela fait partie d'un plan sur une voire deux saisons (après tout, ses intrigues existent bien dans les romans), mais,hélas, la narration est si décousue qu'on a bien du mal à adhérer à l'univers dépeint.

 

 

 

En l'état, The Strain n'a donc rien de révolutionnaire, elle se situe juste dans la moyenne des productions sitôt vue, sitôt oubliées. Au pire, elle est une petite curiosité pour les fans du réalisateur Guillermo Del Toro. En soi, cela n'a rien de honteux, mais compte tenu des objectifs que les auteurs s'étaient fixées, il faut bien reconnaître que The Strain est une amère déception.

 

Photo Credit : FX

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