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le cyborgien

Sans snobisme, entre voyage dans le temps et à travers les genres, le Cyborgien tente d'agrandir votre regard.

31 Oct

New York 911 : les héros du quotidien

Publié par André COTE  - Catégories :  #Urgences, #09-11-2001, #Sully, #New York 911, #Third Watch, #John Wells, #NBC, #E.R., #Bosco, #secouriste

 

 

 

Que ce soit pour une série télé ou un long-métrage, la phase la plus complexe à mettre en œuvre se résume en un mot : l'introduction. Comment capter l'attention du public en une fraction de seconde ? Comment rendre familier tout un univers et des personnages que le spectateur ne connaissait pas quelques secondes plus tôt ? Celle de Third Watch, ou New York 911 en VF, est à ce titre exemplaire. Nous nous retrouvons dans une voiture de police, sur la banquette arrière, deux officiers en uniforme se disputent sur la procédure à suivre pour appréhender un suspect. La scène est filmée avec une caméra à l'épaule et nous met au cœur de l'action. L'officier au volant s'arrête brusquement aux pieds du petit dealer qui prend la fuite. Filmée en steadycam à présent, on suit la poursuite, avec une musique de Fatboy Slim en fond sonore qui s'achève avec l'apparition d'un troisième agent.  

 

 


Ainsi, en moins de deux minutes, pas moins de trois personnages nous sont présentés. Nous avons la voix de la raison, Faith Yokas (Molly Price), qui s'enguirlande avec son partenaire avant que celui-ci ne pique un sprint, le sage John « Sully » Sullivan (Skip Sudduth) qui observe la situation avant d'arrêter tranquillement le délinquant au bout de la course, et enfin, le chien fou Maurice « Bosco » Boscorelli. Deux minutes, il n'en faut pas plus pour qu'une ambiance soit posée, pour que New York soit représentée comme une ville qui respire l'authenticité, quoiqu'un peu policée.  

Il faut dire que les auteurs ne peuvent pas se permettre de perdre du temps, et ce, pour une raison toute simple : la galerie très ambitieuse de personnages. En effet, New York 911 ne raconte pas seulement le quotidien d'officiers de police en uniforme, mais englobe le personnel du services des urgences, celui qui intervient lorsqu'on appelle le 911 aux États-Unis, et qui correspond au SAMU et aux pompiers en France. En l'espace de dix minutes, nous faisons la connaissance de deux patrouilles de police, des sapeurs-pompiers et des ambulanciers. En somme, plus d'une dizaine de personnages qui vont se croiser au gré des situations de l'acabit d'une dispute conjugale qui s'étend sur la voie publique, d'appartement en feu ou, encore, d'un chat coincé dans un arbre.  
 

 


Oui, il ne faut pas espérer un quelconque génie du crime dans les parages. Durant les 6 saisons que compte Third Watch, à peine deux ou trois mafieux se sont détachés du lot. Ici, c'est plutôt la vie des gardiens de la paix et des secouristes qui est mis sur le devant de la scène, des protagonistes relégués le plus souvent dans le décor. D'ailleurs, certain le remarqueront, derrière les caméras, on retrouve des noms comme Christopher Chulack et John Wells, des personnalités qui ont déjà travaillé sur Urgences, le feuilleton avec les médecins de l'hôpital du Cook County à Chicago. Cela s'en ressent à un tel point que l'on ne serait même pas surpris de croiser le temps d'une scène les docteurs de la série médicale dans les couloirs des hôpitaux dans lesquels se rendent les ambulanciers. Inconcevable, puisque les deux séries se déroulent dans deux villes différentes (New York pour l'une, Chicago pour l'autre), l'événement a lieu une fois pourtant, lorsqu'un médecin est contraint de se déplacer dans la Big Apple.  
 
Cependant, cette filiation stylistique n'est pas sans posée quelques problèmes. Lors de le première saison, les auteurs adoptent tout naturellement la narration propre au feuilleton médicale de Chicago, en passant d'un groupe de personnages à un autre. Or, ce qui fonctionne à merveille pour l'une, ne sied pas forcément à l'autre. Urgences peut se permettre une telle narration éclatée en raison de l'unité de lieux en commun : il suffit que les personnages se croisent au détour d'un couloir pour que la caméra suivent les différents fils rouges des protagonistes sans engendrer de confusion dans l'esprit du spectateur. Une chose difficilement plus concevable lorsque les groupes sont éparpillés dans la ville.  
 

 

 


Une configuration qui change dès la saison 2 où les scénaristes focalisent leur attention sur un ou deux personnages dans le principe des chaises musicales : quand l'un est mis en valeur, les autres sont plus en retrait, et ceci à tour de rôle. De cette manière, cela permet aux épisodes de laisser respirer la narration, les intrigues s'entremêlent harmonieusement et les scénaristes se permettent des story-arcs sur plusieurs épisodes. 
 
C'est à partir de ce moment là que New York 911 prend tout sa dimension et reste intense et palpitante tout au long des saisons suivantes. Les intrigues vont du simple méli-mélo sentimentale (untel va-t-il déclarer sa flamme à bidule ?) jusqu'au dilemme individuel qui entraîne une réelle réflexion sur la société. En effet, chacun des secouristes se retrouvent à un moment ou un autre devant une impasse où les moyens mis à disposition ne suffissent pas (ils ne peuvent apporter qu'une aide ponctuelle et non faire de suivi) ou ils voient leur compétence mis à rude épreuve, torturés à l'idée de ne pas avoir respecté la procédure dans le feu de l'action, étant donné qu'un détail comme un collier cervical mal installé peut entraîner la paralysie à cause du transport.  

 

 

 


Lors de la saison 3, la série connaît un tournant suite aux attentats du 11 Septembre 2011 où des avions ont percutés les deux tours du World Trade Center. Étant donné que nous suivons le personnel des urgences de la ville de New York, il aurait été impardonnable pour des raisons de crédibilité que les scénaristes n'en fassent pas au minimum mention. Une situation qui n'aurait pas été sans provoquer un petit buzz dans l'Hexagone et qui révélait surtout les préjugés qu'une fiction, d'origine américaine qui plus est, peut encore faire l'objet : pour résumé, la production était accusée de profiter d'une tragédie, encore récente dans les mémoires, pour attirer le public devant l'écran, autrement dit de « profiter de l'occasion à des fins purement mercantiles ». Se serait vite oublié la dimension « miroir de la réalité » qu'une fiction (drame ou comédie) doit comporter pour créer une suspension de crédulité. On rappelle que les événements de l'actualité, et là je parles bien de la vie réelle, comme les préoccupations de l'époque que ce soit la politique ou les modes, sont déjà ouvertement cités dans le feuilleton. Ceci est une manière pour les auteurs (de New York 911 mais de toute production télévisuelle dans sa globalité) de créer une proximité avec le spectateur. 
 
Ainsi, les scénaristes écrivirent des épisodes pour mettre les personnages en tant que des témoins des événements. Ceux-ci sont finalement mis en scène par une ellipse (on n'entend que le bruit des avions mais aucune image, pourtant surexploitée dans les JT, n'est montrée) servant juste de conclusion à un épisode titré « 10 septembre ». Par la suite, l'événement est exploité uniquement à des fins narratives puisque le récit suivant (« Une semaine plus tard ») nous montre absolument tous les personnages endeuillés, suite à la disparition de leurs collègues et amies. En outre, nous voyons même ses ambulanciers, officiers de police et surtout sapeurs-pompiers soutenus par toute la population new-yorkaise. Des scènes empreints d'un brin trop de pathos certes, mais qui avait bel et bien eu lieu à ce moment-là dans la réalité.  

 

 

 


Quelques épisodes plus tard, la suite des intrigues reprend son cours, mais la tragédie reste ancrée dans les mémoires. Toujours traitée sous l'angle psychologique, les personnages souffrent des effets qu'un tel événement peut avoir sur le long terme : le monde a changé et ils ont du mal à se faire à cette idée.  
 
Au final, en l'espace de 6 saisons, New York 911 s'affiche comme un vibrant hommage à ses héros anonymes du quotidien. Mélangeant polar urbain, drame médical ou aventure proche d'une version réaliste du film Backdraft de Ron Howard, Third Watch est une grande série, de celle qui nous touche au plus haut point et nous bouleverse. Le 6 mai 2005, elle a fermé ses portes, mais ses personnages restent en nous à jamais.

 

Credits Photo : NBC

New York 911 : les héros du quotidien
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M
Elle est trop bien cette série ! Et j'aime particulièrement les 4 officiers de police qui sont les protagonistes qui apparaissent en premier dans l'épisode pilote de cette vibrante série us.
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